Les concours de vins : Pourquoi se fait-on tous avoir par ces médailles ?

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Vous n’avez pas pu passer à coté : plus un rayon de supermarché sans les voir jouer des coudes.
Ces petites pastilles sont devenues en quelques années les fidèles alliées des français qui considèrent ces récompenses comme des repères utiles pour aiguiller leurs achats.

« Après tout si un jury l’a trouvé bon, je ne peux pas me tromper ! »

Des récompenses qui font vendre plus vite… et plus cher !

En France, 80% des bouteilles de vin sont achetées en supermarché. Sortir du lot dans les rayons représente donc un enjeu stratégique capital pour les producteurs. On comprend mieux alors le rôle de ces médailles qui sont un levier commercial hyper-puissant pour booster les ventes.

“Au sein d’un marché difficile et concurrentiel, les producteurs ont besoin de vendre. Tous les moyens sont bons pour se faire connaître. Dans ce cadre, les médailles représentent un outil marketing et commercial”, analyse Victor, directeur général d’Armonia, une structure spécialisée dans l’organisation de concours de vins (concours international de Lyon, concours international de Gamay, concours Elle à Table, etc).

Harder, better, faster, stronger

Qu’ils soient régionaux, nationaux ou internationaux, il existe plus d’une centaine de concours viticoles. Suivant leur renommée, ces concours offrent aux lauréats de juteux débouchés : entrée dans le marché de l’hôtellerie-restauration, de la grande distribution nationale ou encore ouverture sur l’export international.
Un vin médaillé dans la capitale des Gaules par exemple (concours international de Lyon) aura la possibilité de briller sur la table des restaurants partenaires. Et c’est plus largement le marché CHR (Café, hôtel, restaurant) qui devient accessible grâce au partenariat établi avec Metro, grossiste à destination des professionnels du secteur.

Un joli coup de boost pour les bouteilles récompensées qui n’est pas sans conséquence sur le prix de vente, en moyenne revu à la hausse d’environ 30%.

Voilà pourquoi les vignerons sont nombreux à mettre la main à la poche pour y participer.
Car une médaille, si elle se mérite, se monnaye également, depuis les frais d’inscription jusqu’à l’achat des médaillons.

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Tout le monde est gagnant, sauf les clients !

L’obtention de ce précieux macaron a un coût

Pour participer à un concours, chaque producteur doit d’abord régler une somme forfaitaire variant de 40 à 200€ par échantillon soumis, à laquelle s’ajoutera le prix des médailles autocollantes en cas de succès (quelques centimes l’unité).
A Bordeaux par exemple, l’inscription est de 79€ et les tarifs des macarons sont dégressifs : de 28€ les mille en dessous de 3 000 médaillons, jusqu’à 15€ les mille à partir de 100 000. S’ajoute ensuite une taxe à l’hectolitre de vin médaillé : 0,60€ pour l’or, 0,40€ pour l’argent et 0,25€ pour le bronze.
Plus de 1 000 vins étant présentés à certains concours, le chiffre d’affaires côté organisateurs peut être très conséquent.

Il faut savoir également que les podiums de ces concours ne fonctionnent pas exactement comme ceux que nous connaissons dans le sport. Il est par exemple courant que ces concours ne récompensent pas de médaille de bronze, mais bien 2 breloques d’or. Eh oui, une médaille de bronze fait moins vendre ! Et accessoirement ne rapporte pas autant à l’organisateur…
A contrario, certains concours désireux de faire valoir leur image de spécialistes n’ont récemment pas décerné de médaille pour une catégorie donnée.

Alors, que valent vraiment ces concours ?

D’abord, gardons à l’esprit que le – ou les – vainqueur(s) ne sont jugés « les meilleurs » que par rapport aux vins présentés au concours. Ce qui permet déjà de relativiser le poids de ces récompenses.

Le plus curieux c’est qu’aucune autorité ne régule ces concours. Chacun dispose donc de ses propres règles, à l’exception près de cette seule et unique régulation, fixée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) : il n’est pas permis de médailler plus de 33 % des vins présentés à un concours.
Pour le reste, le champs est libre !

On comprend à présent mieux pourquoi aucun grand cru ne prend le risque de présenter une bouteille. D’abord parce qu’ils n’en ont certainement pas besoin, mais aussi parce qu’ils ont beaucoup plus à perdre qu’à gagner ! Imaginez qu’un très bon bordeaux ne reçoive qu’une médaille d’argent ? Les retombées en terme d’image seraient catastrophiques !

Vous payez donc un vin « moyen », 30% plus cher que sa valeur de base

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Vous l’avez maintenant compris, en choisissant de remplir vos chariots de vins médaillés, vous payez un vin « moyen », 30% plus cher que sa valeur de base.
Vous ne découvrez pas le marketing aujourd’hui n’est-ce pas ? Alors posez-vous les bonnes questions, soyez curieux, discutez avec votre caviste plutôt que de céder aux sirènes de la grande distribution.
Mais d’ailleurs, comment se fait-il que ces vins médaillés ne soient pas distribués chez votre caviste préféré ? 😉

Tous les concours ne sont pas à mettre dans le même panier mais on peut légitimement se poser les questions suivantes :
La multiplication de ces distinctions ne nuit-elle pas à la clarté de l’offre et à la diversification des achats des français ?
Pourquoi n’existe t’il pas une autorité de régulation globale, qui encadrerait la remise de ces récompenses ? Une autorité qui serait capable d’assurer une homogénéité entre tous les prix en veillant à la qualité des lauréats ?

Nous sommes curieux d’avoir votre retour d’expérience sur le sujet. Achetez-vous souvent des vins récompensés ? Pourquoi ? Les conseilleriez-vous ?

Sources :
Vins médaillés : ces attrape-gogos de la grande distribution – à lire sur Rue 89
Concours des vins – à lire sur Wikipedia
Les vins médaillés présentent-ils une garantie de qualité ? – à lire sur FranceTV Info
Que valent vraiment les médailles des concours de vins ? – à lire sur La revue du vin
Les concours – à lire sur le nouvel economiste

Matthieu

Matthieu

Fervent défenseur du ballon de rouge entre copains, savoyard expatrié en terres parisiennes, amateur de blanc converti. J'aime un peu trop les côtes du Rhône, mais ils me le rendent bien.

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3 Comments

rien de nouveau sauf quelques fautes d’orthographe et un pléonasme « export international »
verre plein ou verre vide?
1 vin sur 3 médaillé ou 70% des vins rejetés (plus près de la réalité) ça ne sonne pas pareil et ça fait moins polémique
… un grand Bordeaux non médaillé? une catastrophe? eh non puisque personne ne le sait, banane.
…une autorité régulant les prix: ça c’est une idée qu’elle est bonne. Il doit rester encore un ou deux pays communistes à qui le proposer.
pour le reste ça ne va pas m’empêcher de boire des vins médaillés, au contraire ça donne soif.

Bonjour Benard ! Tout d’abord merci pour votre intérêt 🙂
Nous avons rédigé cet article dans l’optique de défendre notre vision du vin (peut-être naïve je vous l’accorde). Ces concours existent dans tous les corps de métier : dans la communication par exemple, il n’est pas rare de voir des agences travailler dans l’unique but de récolter un Lion à Cannes, oubliant presque leur objectif primaire. C’est précisément ce que nous dénonçons.
On n’est pas loin de voir dans les étalages des supermarchés des vins crées et « markétés » pour devenir des bêtes de foire.

Mais l’important c’est bien de garder la soif (et la banane) comme vous dites ! Et entre copains de préférence 😉

Ah, et merci pour les corrections orthographiques, il nous arrive encore fréquemment de laisser passer quelques coquilles :-/
A bientôt sur PVEC.com

Merci pour votre article particulièrement intéressant (j’y ai beaucoup appris). Je me permet de répondre à Bernard en donnant aussi mon avis !
1/3 ou 70% de perdant, c’est énorme et tout de même anormal quand on voit que la quasi majorité des concours colle au maximum à cette règle. Si un grand Bordeaux n’est pas médaillé alors ça risque de se savoir et ça serait terrible pour son image, rien a gagné donc … et beaucoup à perdre !
Une autorité régulant les prix des vins, non … mais une autorité régulant les concours de vins ! La question de la protection du consommateur existe bien dans notre société bien capitaliste (n’en déplaise aux communistes) et semble s’imposer quand on voit la jungle qui règne dans le milieu des concours de vins.

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